Le carnaval arrive, tous dans les rues!
Depuis son invention il y a 2000 ans, de l’Antiquité en passant par la Belle Epoque, le carnaval a évolué au fil du temps. Les manifestations sont spécifiques à chaque civilisation, mais on conserve cette notion de bouleversement des rôles et des statuts sociaux.
Ce concept a servi les classes sociales ou les peuples oppressés et revendicatifs. C’était l’occasion d’exprimer les frustrations et la colère parfois ancestrales. Une fois l’an, presque tout est permis !
La dérision envers soi même ou envers d’autres, du présent ou du passé, est l’un des fondements du carnaval.
Défoulement, couleurs, festival, explosion ! Chaque dimanche depuis l’épiphanie jusqu’au mercredi des cendres, les groupes carnavalesques « déboulent » dans les rues pour le plus grand plaisir de tous.
Les « Mas » (les Masques, ou déguisements)
Les préparatifs sont importants et bien orchestrés : le « thème » du carnaval est choisi par les fédérations du carnaval, chaque île a son comité. Puis les groupes s’organisent : ils conçoivent leurs costumes et les fabriquent avec soin.
Traditionnellement, les esclaves utilisaient le carnaval pour pratiquer les rites religieux ancestraux qui étaient interdits par l’autorité catholique de l’époque. Les masques étaient alors ceux de divinités africaines ou des tribus d’origine, et les cérémonies initiatiques et d’exorcisme étaient pratiquées. Aujourd’hui le Masque ou « Mas » a perdu son caractère sacré mais la référence historique est vivante et les émotions vécues sont réelles.
Le « Mas » selon la conception africaine du terme désigne l’ensemble des éléments dont se recouvre la personne de la tête aux pieds, contrairement à la conception occidentale qui renvoie au visage. Une personne qui entre dans un « Mas » perd en quelque sorte sa personnalité, elle devient le Masque, « Mofwazé an Mas » (l’Esprit du Mas).
Selon la tradition, les «Mas» sont faits de jute, de toile de bananier et autres matières naturelles. Certains groupes (Voukoum, Basse Terre) ont gardé leur attachement à la tradition. Les sacs ou tissus de jute sont transformés en costumes, les serpillières portugaises font office de cheveux, les journaux (en noir et blanc) sont découpés en lanières pour fabriquer l’impressionnant « Mas a fwèt » (Masque à Fouet), les « boutou » (branche d’arbre) et les coquillages ou racines sont la touche finale du « Mas » traditionnel.
La peinture recouvre les mains, le visage ou les parties du corps laissé à la vue par le Mas, par exemple de la peinture bleue pour le « Mas tirayè Sénégal » (Masque des tirailleurs sénégalais), parfois d’autres matières sont utilisées selon le jour ou le thème : farine pour le « Mas a man ibè » (Masque de Dame Hubert) , huile de table et roucou pour le « Mas a Roukou » (Masque à Roucou), mélasse de canne à sucre, sirop de batterie et suie pour le « Mas a kongo ».
Par ailleurs, modernité oblige, certains groupes (Waka, Basse-Terre) défilent en tenues d’apparat, rappelant un peu le carnaval brésilien ou italien. Ils choisissent alors des matières plus contemporaines, voire dernier cri ! Ils utilisent pour la fabrication des costumes des matériaux modernes comme le lurex, le satin, le lycra pailleté, et même un tissu papier hologramme doré/argenté qui change de couleur !
Mélange de modernité et de tradition, le carnaval antillais surprend par sa force et sa diversité.
Papiyon volé cévolé nou ka volé !